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CRITIQUE | « Les oubliés » : déterrer l’Histoire

  • Francis Dupont
  • 27 févr. 2017
  • 3 min de lecture

Les oubliés (V.O. Under sandet) - Allemagne/Danemark, drame historique, 100 minutes. Réalisation: Martin Zandvliet | Scénario: Martin Zandvliet | Photographie: Camilla Hjelm | Montage: Per Sandholt & Molly Marlene Stensgaard | Musique: Sune Martin | Direction artistique: Gitte Maling | Costumes: Stefanie Bieker & Claudia Maria Braun | Producteurs: Malte Grunert & Mikael Chr. Rieks | Interprètes: Roland Møller, Mikel Følsgaard, Laura Bro, Louis Hofmann, Joel Basman, Oskar Bökelmann, Emil Belton, Oskar Belton, Leon Seidel

Parfois, le cinéma s’entête à répéter les mêmes histoires, à refaire les mêmes films basés sur les mêmes faits historiques. D’autre fois, le septième art surprend et ravive dans la conscience collective des faits oubliés ou peu connus. C’est le cas du film danois Les oubliés, version française de Under sandet, qui a révélé un pan méconnu de l’histoire danoise, mais tristement véridique, s’étant déroulé au lendemain de la Seconde Guerre mondiale.

Les bombardements à peine terminés, l’Allemagne ayant tout juste capitulé, le Danemark se relève d’un conflit qui l’a laissé profondément marqué comme toutes les autres nations d’Europe. En mai 1945, de jeunes prisonniers de guerre allemands sont confiés au Danemark. 14 de ces jeunes hommes ont pour mission de déminer les plages de la côte ouest du petit pays scandinave. Les plus jeunes membres de cette escouade entrent à peine dans l’adolescence, les plus âgés sont de jeunes adultes. Avec une formation rudimentaire et sans nourriture, ils doivent déterrer centimètre par centimètre, à mains nues, les plages danoises afin de trouver 45 000 mines allemandes enfouies durant le conflit. Ils sont supervisés par le sergent danois Leopold Rasmussen (Roland Møller) qui, comme le reste de la population danoise, méprise les Allemands, leurs anciens occupants. Au sein du groupe de démineurs, le travail est ardu, les conditions de vie difficiles et le moral au plus bas. Le jeune Sebastian Schumann (Louis Hofmann) devient le meneur de la bande, celui qui garde espoir de revoir l'Allemagne malgré la fatalité de leur mission.

Martin Zandvliet a confié en entrevue qu’il voulait chambouler la perception que les Danois ont d’eux-mêmes. Dans la conscience danoise et internationale, le Danemark est ce petit pays tranquille et pacifique, patrie de la Petite Sirène. Pourtant, les Danois, comme tous les autres peuples, ne sont pas exempts d’erreurs passées. Le sort réservé aux jeunes Allemands, pour la plupart recrutés en dernier recours vers la fin de la guerre, par la population danoise est loin d’avoir été gracieux. Zandvliet propose une réflexion sur cet événement et pose le spectateur devant un enjeu éthique qui n’est pourtant pas nouveau. Le vainqueur a-t-il l’autorité morale pour traiter le perdant comme il l’entend? La vengeance passe-t-elle nécessairement par la cruauté? Il est délicat de répondre fermement puisque le cinéaste confronte le spectateur à des protagonistes qui ne sont pas tout blanc ou tout noir. Ces jeunes Allemands ont bel et bien participé à la guerre sous le drapeau du Troisième Reich, mais ils sont tout de même des gamins. Pour sa part, le sergent Rasmussen est lui-même confronté à ce conflit intérieur. De prime à bord, il déteste violemment les Allemands comme en fait foi une scène en début de film. Au fil du temps, côtoyer ces soldats allemands qui sont dans un état de vulnérabilité lui fait voir les jeunes hommes qui se cachent derrière les uniformes. Le scénario de Martin Zandvliet est finement ficelé afin de laisser transparaître l’ambiguïté des attitudes humaines lors d’un événement aussi traumatique qu’une guerre.

Si le scénario humanise ces hommes de guerre, la réalisation de Zandvliet s’engage dans une démarche similaire. Grâce à aux gros plans et au montage, il crée une tension exacerbant le danger dans lequel se retrouvent les jeunes démineurs. Les scènes de déminage sont remplies de tension et le cinéaste joue habillement avec cette atmosphère. Il faut aussi souligner l’interprétation remarquable de Roland Møller qui donne vie à un sergent dépeint comme un homme d’armée violent, mais qui se révèle tranquillement être beaucoup plus complexe.

Les oubliés est un film captivant par son sujet et, aussi, par le traitement qu’en fait Martin Zindvlet. Il se classe parmi ces films, comme Hiroshima, mon amour ou Le Choix de Sophie qui se concentrent sur les conséquences humaines de la Seconde Guerre mondiale. Ici, Zandvliet fait un travail honorable et remarquable à déterrer l’histoire de victimes oubliées.

4 étoiles

Les oubliés est à l'affiche le 24 février au Québec.

 
 
 

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